Hommage au réel…

L’homme que produit notre civilisation ne s’intéresse plus qu’aux abstractions. Il aimera l’humanité car il n’en coûte rien d’aimer un javanais, mais il détestera son voisin et ne fera rien pour lui être agréable car, dans ce dernier cas, il s’agit de relations vivantes : on sort de l’abstraction ; il faut faire un effort et c’est justement cet effort que nos civilisations n’enseignent plus. On demandera à l’État de se substituer à tout, on lui demandera des assurances pour toutes les circonstances de la vie entière de sorte que l’on n’ait plus rien à prévoir soi-même ni à corriger et que l’on vive sans soucis de la naissance à la mort.

Mais qui ne voit que cet homme aura perdu de sa vitalité par le fait même qu’il n’aura pas à combattre, qu’il sera plein de vertus qui ne lui coûteront rien, qu’il sera anémié, endormi parce qu’il ne fera aucun effort et c’est cela que sentent confusément, d’une manière instinctive, ceux qui vont demander un tonique à la nature. Mais elle a ses règles. Il faut jouer le jeu correctement, sans tricher. Avec elle, il n’y a plus d’abstractions. On est en contact direct avec le réel. Ici il faut sarcler, la tailler, arroser, protéger contre les intempéries, le soleil, le vent, les bactéries, les insectes, certains animaux et même les hommes.

Il n’y a que des cas concrets avec lesquels il faut déployer les ressources de ses mains ou de son intelligence. On est dans une défensive permanente contre le mal qui vous guette et aussi dans une offensive pour le bien que l’on veut faire. Il n’y a plus de formules générales pour s’abriter. Chaque cas demande une solution particulière, il faut retrouver l’instinct perdu, compter avant tout sur soi, devenir fort… pour soi-même d’abord : c’est l’animal, et aussi pour les autres : c’est l’homme !

Léon Parcé

1894 – 1979 (Extrait des notes personnelles)

 

 

Léon Parcé, 1894-1979

De Léon Parcé ( ancien de polytechnique ), certains gardent le souvenir du co-fondateur et PDG de la S.A.T ( Société Anonyme de Télécomunications ) qui deviendra par la suite la SAGEM , d’autres se souviennent d’un homme silencieux, passionné de peinture et de photographie. A Banyuls, pour les plus anciens, il reste celui qui naquit et grandit au Puig del Mas. Si ses responsabilités au sein de la S.A.T le retenaient loin de Banyuls, ses origines paysannes le tinrent à l’écart des mondanités parisiennes. Il nous légua en 1978 le vignoble familial qu’il avait amoureusement entretenu.